Je suis issue d’une génération où les bandes dessinées dépeignaient l' Amérindien (rouge), tel un barbare, le cowboy (blanc), un héros intelligent et civilisé, l'africain (noir), un gentil sauvage plongé dans la barbarie, de temps en temps avec des pulsions ”cannibalistes” et l'asiatique (jaune) sournois, avec d’énormes dents.
En Occident, la guerre est souvent précédée d’une manipulation subtile des esprits, une stratégie qui a fait ses preuves pendant des décennies. Cependant, avec l’avènement des réseaux sociaux, le contrôle total de l’information est devenu une illusion. *Cette brèche a ouvert la voie à des mercenaires de tous horizons* .
Pendant ce temps, le journaliste traditionnel est confronté à une remise en question impérative, pour éviter l’extinction de sa profession.
Au tournant du millénaire, alors que j’embrassais, en jeune journaliste l’informatique, bon nombre de mes collègues, sinon la majorité, rejetaient l’idée même d’un clavier et d’un écran. **_Pendant que les jeunes générations plongeaient tête baissée dans cette nouvelle technologie, ceux de ma génération et les plus âgés s’y opposaient**farouchement.
*Aujourd’hui, il est évident que même ceux qui refusaient d’allumer un écran, sont désormais rivés à l’écran de leur téléphone. Cela illustre à quel point le monde évolue rapidement, pour le meilleur et pour le pire.*
Nous vivons dans un monde rempli de contradictions, d'imposture, de dérives et d’impossibilité de maîtriser cet outil qu’est l’informatique et l’information. Souvent, les lois sont contraintes de s’adapter, d’être créées après l’apparition de nouveaux délits ou crimes liés à l’outil Internet. Nous faisons face désormais à des valeurs factices, où la manipulation est la norme. L’influenceur, de façon pernicieuse, maquille la réalité. Le Cameroun, l’Occident et le monde en général n’échappent pas à cette réalité, avec la montée en puissance de phénomènes tels que le néonazisme, le racisme, la pédophilie, la prostitution à l’échelle planétaire et l’explosion d’une imagination sans limites, révélant ce que l’être humain peut avoir de plus sordide, grâce aux réseaux sociaux. Malgré tout, n'oublions pas que chaque époque a eu sa révolution : création de l’imprimerie, le téléphone, la radio, la télévision, etc.
D’un autre côté, l’outil Internet permet de résoudre des problèmes apparemment insolubles, et offre un foisonnement d’idées et de cultures tout aussi positifs. **Le Cameroun, qui n’a pas inventé le fil à couper le beurre, voit toutes ses chapelles, qu’elles soient politiques, religieuses, sociales, économiques, culturelles, etc., se retrouver sur la toile.*
Cependant, le danger réside dans le fait que nous sommes le dernier bastion de ceux qui ont véritablement connu l’essence d’un livre à l’ère numérique. Si nous échouons à transmettre l’amour des livres, l’art de la lecture pourrait être englouti par le numérique* . Cela aurait des conséquences profondes sur l’apprentissage et l’imagination. Constitue donc une nécessité incontournable une véritable réforme de l’éducation, un des défis majeurs étant de préserver l’expérience de la lecture, l’acquisition et la transmission des connaissances fondamentales. *S’il faudrait reconnaître que c'est grâce à l’internet que notre génération a commencé à avoir accès à la véritable histoire de notre pays,* les jeunes générations sont en train de s’immerger de plus en plus dans le monde virtuel, naviguant dans l’insaisissable avec plus ou moins de bonheur et possibilité de recul.
L’éducation ne dépend pas seulement de la famille, mais aussi de nombreux autres facteurs et acteurs, qui offrent une diversité d’expériences, de rencontres et d’environnements. Comme quoi ce proverbe africain a toute sa signification ici : “ Il faut tout un village pour élever un enfant.”
*Par Isabelle ESSONO*
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